Défaisons-nous de nos mythes! Mettons les styles d’apprentissage et la pyramide d’apprentissage à la poubelle

Unicorn

Par Sophie Lanoix

Les neurosciences sont en pleine essor et la quantité d’études sur le cerveau a explosé depuis quelques années. On comprend de mieux en mieux les mécanismes de fonctionnement du cerveau et, plus important pour nous, comment l’humain apprend. Cependant, on se rend compte que certaines croyances très répandues sont erronées et que plusieurs mythes persistent quant au fonctionnement du cerveau et de son impact sur l’apprentissage.

Une étude québécoise (Blanchette Sarrasin et al., [accepté]), a recensé les cinq neuromythes les plus populaires chez les enseignants du Québec :

  1. Les élèves apprennent mieux lorsqu’ils reçoivent l’information selon leur style d’apprentissage préféré.
  2. Les élèves possèdent un profil d’intelligence prédominant, par exemple logicomathématique, musical ou interpersonnel, dont il faut tenir compte dans l’enseignement.
  3. Des différences entre les élèves dont le cerveau gauche est dominant et ceux dont le cerveau droit est dominant peuvent aider à expliquer des différences d’apprentissage observées chez les élèves.
  4. De courts exercices de coordination, comme toucher sa cheville gauche avec sa main droite et vice-versa, peuvent améliorer la communication entre les deux hémisphères du cerveau.
  5. Nous utilisons environ 10 % de notre cerveau.

Je n’ai pas trouvé d’étude similaire pour les mythes sur la formation en milieu de travail, mais j’entends souvent des professionnels de la formation véhiculer ces mêmes mythes. Il est grand temps d’y mettre fin! Dans cet article, commençons par nous attaquer aux styles d’apprentissage et à la pyramide de l’apprentissage.

Mythe no 1
Il faut adapter sa formation au style d’apprentissage de l’apprenant

Le mythe

Vous l’avez déjà entendu, c’est certain. Régulièrement, quelqu’un affirme qu’on doit adapter nos formations aux styles d’apprentissage des participants parce qu’on apprend mieux si on reçoit l’information dans notre style d’apprentissage.

La part du vrai dans ce mythe

Il existe des études qui démontrent qu’une personne peut avoir une préférence pour recevoir de l’information. En conséquence, plusieurs études ont tenté de prouver qu’une méthode d’enseignement adaptée au style d’apprentissage est plus efficace et augmente la rétention ou la compréhension

La réalité

Malheureusement, aucune étude n’a réussi à prouver que l’on apprend mieux quand la formation est adaptée à notre préférence.

Les preuves qu’il s’agit d’un mythe

  1. En 2015, Rogowski et al. ont posé l’hypothèse que les personnes « visuelles » apprendraient mieux avec des mots écrits et que les personnes « auditives » apprendraient mieux avec un livre audio. Leur étude a démontré que les deux groupes d’apprenants ont mieux appris avec le texte écrit qu’avec le livre audio.
  2. En 2017, Cuevas et al. ont aussi testé les styles d’apprentissage avec des étudiants universitaires. Ils ont trouvé que les apprenants qui ont reçu le matériel de formation adapté à leur préférence n’avaient pas mieux retenu l’information que les apprenants qui l’avaient reçu dans un autre style. Ils ont par contre trouvé que les apprenants qui ont reçu l’information de manière visuelle ont mieux appris que tous les apprenants qui l’ont reçu de manière auditive.
  3. En 2017, Paschler et al. ont fait une recension des écrits sur les styles d’apprentissage. Ils ont conclu « qu’il n’y a présentement pas de preuve adéquate qui justifie l’utilisation des styles d’apprentissage dans les pratiques éducatives ».

L’impact sur nos façons de faire

Maintenant que nous savons tous qu’il s’agit d’un mythe, nous devons :

  1. Arrêter de parler des styles d’apprentissage pour ne plus propager le mythe
  2. Varier les méthodes d’enseignements et surtout les façons d’expliquer
  3. Accompagner les explications verbales de graphiques ou d’images
  4. Arrêter de perdre du temps et de l’argent à essayer d’adapter nos formations aux styles d’apprentissage des participants

Mythe no 2
On ne retient que 5 % de ce que l’on entend

J’entends souvent des professionnels de la formation citer la « pyramide d’apprentissage » pour justifier leur design pédagogique. Mais d’où vient cette fameuse pyramide? Et quelle est sa validité?

L’évolution du mythe

En 1946, Edgar Dale propose une hiérarchie de méthodes d’apprentissage pour les adultes. Dans cette version, on peut voir des méthodes d’enseignement dans une pyramide, sans aucun nombre.

Le cône d'expérience de Dale, 1946
Dale, 1946 – Traduction libre

Au cours des années, des personnes ont mal cité Dale. À leur tour, ces personnes ont aussi été mal citées. De fil en aiguille comme dans le jeu du téléphone, des pourcentages — très précis et tous arrondis au 5 ou 10 % — sont apparus en 1960 dans la pyramide de Dale, ainsi que la liste « Les gens se souviennent généralement de… ».

Wiman & Meriheny, 1960, based on Dale, 1946 – Traduction libre

En 2002, le National Training Laboratories du Maine est allé encore plus loin et a ajouté les notions de méthodes d’apprentissage passives et actives à la pyramide.

National Training Laboratories, Maine, 2002, based on Dale 196 – Traduction libre

Plusieurs groupes de chercheurs se sont penchés sur l’évolution de ce mythe et son explication. Subramony et al. ainsi que Letrud, K., & Hernes, S. ont écrit plusieurs articles sur le sujet en prenant l’angle de l’historique du mythe afin de trouver à quel moment les nombres sont apparus dans le schéma original de Dale et qu’il a été ainsi déformé. À ma connaissance, aucune étude n’a reproduit les chiffres que l’on trouve dans la pyramide.

Pourquoi le mythe est-il tenace

Comme la théorie semble valable et sensée et comme elle appuie ce qu’on croit instinctivement des méthodes d’apprentissage actives et passives, elle est largement adoptée et répétée partout par les enseignants et les formateurs de tout acabit.

L’impact sur nos façons de faire :

Maintenant que nous savons tous qu’il s’agit d’un mythe, nous devons :

  1. Arrêter de parler de la pyramide d’apprentissage pour ne plus propager le mythe.
  2. Sélectionner les méthodes d’enseignement en fonction de nos objectifs d’apprentissage, incluant l’enseignement magistral, la démonstration et l’apprentissage collaboratif.

Qu’en pensez-vous? Est-ce que vous changerez vos façons de faire, sachant que ce sont des mythes?

Pourquoi est-ce si difficile de se défaire de ses croyances? Tout simplement parce qu’on croit en nos sources. Dans l’étude de Blanchette Sarrasin (accepté), les enseignants citent l’université, la logique et l’observation pratique comme sources liées à leur adhésion aux mythes. Et vous, d’où vous viennent vos mythes? De vos collègues, de vos lectures dans des revues de science populaire?

Références

Blanchette Sarrasin, J., Riopel, M., & Masson, S. (accepté). Les neuromythes chez les enseignants québécois : à quel point sont-ils fréquents et quelle est leur origine? Éducation Canada.

Cuevas, J., & Dawson, B. L. (2018). A test of two alternative cognitive processing models: Learning styles and dual coding. Theory and Research in Education16(1), 40-64. doi.org/10.1177/1477878517731450

Letrud, K., & Hernes, S. (2016). The diffusion of the learning pyramid myths in academia: an exploratory study. Journal of Curriculum Studies, 48(3), 291-302.

Letrud, K., & Hernes, S. (2018). Excavating the origins of the learning pyramid myths. Cogent Education, 5(1), 1518638.

Masson, S. 19 et 26 novembre 2019. « Neuromythes ». Cours Neuroéducation et didactique générale. Montréal : Université de Montréal. Montréal : UQAM.

Pashler, H., McDaniel, M., Rohrer, D., & Bjork, R. (2008). Learning styles: Concepts and evidence. Psychological science in the public interest9(3), 105-119.

Rogowsky, B. A., Calhoun, B. M., & Tallal, P. (2015). Matching learning style to instructional method: Effects on comprehension. Journal of educational psychology107(1), 64. doi :10.1037/a0037478

Subramony, D. P., Molenda, M., Betrus, A. K., & Thalheimer, W. (2014). Previous attempts to debunk the mythical retention chart and corrupted Dale’s Cone. Educational Technology, 17-21.

Subramony, D. P., Molenda, M., Betrus, A. K., & Thalheimer, W. (2014). The Good, the Bad, and the Ugly: A Bibliographic Essay on the Corrupted Cone. Educational Technology, 22-31.

Subramony, D. P., Molenda, M., Betrus, A. K., & Thalheimer, W. (2014). Timeline of the Mythical Retention Chart and Corrupted Dale’s Cone. Educational Technology, 31-34.

Tokuhama-Espinosa, T. (2018). Neuromyths: Debunking false ideas about the brain. WW Norton & Company.


Apprenez mieux! Astuces pour tirer le maximum de vos formations

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Par Sophie Lanoix

Nous sommes tous apprenants. Parfois volontaires, parfois obligés. Dans les deux cas, la participation à de la formation prend du temps précieux dans notre horaire chargé. Pourquoi ne pas alors en tirer le maximum?

Télécharger mon journal d’apprentissage

En tant que participant.e, nous n’avons généralement pas ou très peu d’influence sur le design de la formation. Ce sur quoi nous avons de l’influence, c’est notre motivation à apprendre et notre attention pendant la formation. Nous pouvons aussi utiliser des astuces concrètes pour améliorer la rétention de nos apprentissages et nous aider à transférer nos apprentissages dans notre travail quotidien.

Il n’y a pas que les enfants qui doivent apprendre des choses par cœur. En tant qu’adulte, nous devons également parfois être en mesure de nous souvenir de quelque chose rapidement afin de l’appliquer sans avoir recours à un aide-mémoire. Exemples :

  • Pilote, pompier.e, policier.e : procédures d’urgence
  • Contrôleur.e aérien : données d’aéroports et de voies aériennes
  • Médecin et infirmier.e : procédures médicales
  • Représentant.e commercial : caractéristiques d’un nouveau produit
  • Examens : d’université, pour un poste, pour entrer dans un ordre professionnel, pour obtenir une certification

Ce que vous pouvez faire AVANT la formation

Astuce 1 : Croyez en votre CAPACITÉ à apprendre

Croyez-vous être capable d’apprendre, de vous améliorer et de changer? Si oui, vous avez un état d’esprit dynamique. Si, au contraire, vous croyez être bon ou pas dans un domaine et que ça ne vaut pas la peine de faire des efforts pour apprendre et s’améliorer, vous avez un état d’esprit fixe. Si vous avez tendance à avoir un état d’esprit fixe, souvenez-vous que vos compétences résultent de vos connexions neuronales et que celles-ci changent continuellement, quels que soient votre âge et vos aptitudes naturelles.

Si vous abordez une formation en croyant que vous pouvez apprendre et vous améliorer, vous augmentez vos chances de retenir le contenu de la formation. Vous serez aussi plus en mesure de vous imaginer faire la tâche ou exercer la compétence, ce qui augmente vos chances de mettre en pratique ce que vous apprenez pendant la formation. Surtout, vous activez vos mécanismes de correction d’erreur, ce qui vous aidera à améliorer vos apprentissages et votre performance. On apprend toujours de nos erreurs… ou du moins, on le devrait!

Astuce 2 : Sachez POURQUOI vous participez à la formation

À quel moment prenez-vous connaissance des objectifs d’apprentissage d’une formation? Avant de vous inscrire ou lorsque la formation commence? Si vous voulez maximiser votre rétention et vos chances de transfert, vous devriez savoir POURQUOI vous prenez une formation bien avant de vous présenter en classe ou de commencer le cours en ligne.

En étant conscient de la manière dont la formation pourra vous aider dans votre travail quotidien, vous serez plus en mesure de vous projeter dans le futur en accomplissant la tâche. Encore plus important, en faisant des liens concrets entre les contenus et votre travail, vous augmenterez la valeur perçue de la formation pour vous. Ces deux éléments très importants augmentent la probabilité que vous mettiez en action dans le milieu de travail ce que vous apprendrez en formation.

Ensuite, votre participation à une formation devrait s’inscrire dans votre plan d’apprentissage ou votre plan de développement des compétences. Quel est le lien entre cette formation et les autres auxquelles vous avez ou vous allez participer? Comment cette formation contribuera-t-elle à votre développement personnel ou de carrière?

Finalement, vous devez également vous assurer d’avoir les prérequis à la formation afin de pouvoir bien intégrer les nouvelles connaissances et habiletés. Vous avez des doutes sur l’utilité d’une formation pour vous? Discutez-en avec votre supérieur, vos collègues ou d’anciens participants.

Astuce 3 : Prévoyez des occasions de PRATIQUE

D’abord, pourquoi offrez-vous de la formation dans vos organisations? Généralement, parce que vous voulez que les gens changent de comportement ou adoptent de nouveaux comportements. Par exemple, si vous donnez de la formation sur le leadership, c’est pour que les gestionnaires changent leur façon de gérer et soient plus efficaces et efficients. Si vous donnez une formation sur l’utilisation d’un chariot élévateur, c’est que vous voulez que les employés adoptent des comportements sécuritaires lorsqu’ils utilisent le chariot élévateur.

Pour répondre à la question « Pourquoi le cerveau doit-il être actif pour apprendre? », on doit regarder ce qui se passe dans le cerveau pendant qu’une personne apprend. Le comportement d’une personne dépend de ses connexions neuronales. Pour changer de comportement, on doit donc créer de nouvelles connexions entre nos neurones ou carrément créer de nouveaux neurones. C’est la définition même de l’apprentissage en neuroscience.

Quand une personne apprend une nouvelle habileté ou un nouveau comportement, des neurones s’activent et se connectent ensemble. Si ces neurones s’activent et se connectent ensemble assez souvent, il se crée un chemin entre les neurones, un peu comme un sentier en forêt. Lorsque le chemin est bien tracé, l’habileté ou le comportement est bien ancré et la personne est en mesure de le reproduire. Plus le sentier est fréquenté, plus il est tracé profondément, plus facile il est de l’emprunter. Donc, plus on exécute un geste souvent, mieux et plus facilement on s’en souvient.

Ce que vous pouvez faire PENDANT la formation

Astuce 4 : Soyez ATTENTIF et réduisez les distractions

Vous venez de payer très cher pour participer à une conférence dans votre domaine. Les conférenciers sont très intéressants, mais comme dans toutes les conférences, ils se succèdent dans une longue suite de présentations magistrales. Lorsque vous vous concentrez sur le propos d’une présentation magistrale et que vous suivez les explications du présentateur, les zones qui s’activent dans votre cerveau sont les mêmes que si vous faisiez l’action vous-mêmes. Votre apprentissage commence déjà (j’ai déjà effleuré cet aspect du point de vue du concepteur dans cet article).

De plus, si vous êtes constamment distrait par vos courriels et toutes sortes de notifications sur votre téléphone ou votre ordinateur, vous absorbez une moins grande quantité de connaissances que si vous portez pleine attention à la présentation. Une étude a même démontré que le seul fait d’avoir votre téléphone intelligent dans votre champ de vision réduit la capacité cognitive disponible pour apprendre. Le simple fait de ranger votre téléphone dans un sac ou de le laisser dans une autre pièce augmente votre rétention et cette différence est encore plus marquée pour les personnes considérées comme dépendantes à leur téléphone.

Astuce 5 : RALENTISSEZ le rythme!

Que ce soit dans une conférence, un cours en classe ou un cours en ligne, parfois, vous êtes placés dans une situation d’apprentissage passive malgré vous. Vous pouvez quand même devenir des apprenants actifs!

Pour écouter plus activement un présentateur, interrompez le flot d’information et participez activement. Lorsque c’est possible, posez des questions, réexpliquez ou reformulez le propos qui vient d’être discuté.

Pour une lecture plus active d’un texte ou d’un cours en ligne, interrompez votre lecture pour réfléchir au contenu. Posez-vous des questions sur ce que vous venez de lire et établissez des liens avec d’autres concepts, connaissances et expériences. Tentez d’anticiper ce qui vient, d’expliquer ce que vous venez de lire et surtout tentez de vous souvenir de ce que vous venez de lire. Vous pouvez également chercher la définition d’un mot. Si vous avez de la difficulté à vous arrêter naturellement, planifiez vos temps d’arrêt, à la fin d’un chapitre, d’une section ou toutes les 30 minutes, par exemple.

Ce que vous pouvez faire APRÈS la formation

Astuce 6 : Faites des efforts pour vous SOUVENIR des contenus

Faite le sondage autour de vous : comment les gens étudient-ils pour s’approprier du contenu? Le plus souvent, les gens relisent leurs notes, parfois en soulignant les passages importants. Selon les études — et l’expérience! — cette stratégie d’apprentissage est inefficace! Si vous voulez passer moins de temps à étudier ET vous souvenir de plus de contenu, tentez les stratégies suivantes :

  • Essayez de vous souvenir des contenus SANS les lire avant. Vous pouvez utiliser des fiches papier ou des applications telles que cram.com, flashcard.online, goconqr, etc. (il existe une très longue liste de telles applications).
  • Élaborez des explications. Préparez une liste de questions qui commencent par Pourquoi? et Comment? portant sur le contenu et tentez d’y répondre. N’oubliez pas de vérifier si vous avez la bonne explication! Il serait bête de bien apprendre des connaissances erronées…
  • Schématisez l’ensemble du contenu. En dessinant un diagramme qui met en relation les concepts que vous étudiez, vous devrez y réfléchir plus profondément et les connaissances seront plus ancrées.

Astuce 7 : ESPACEZ vos périodes d’apprentissage

Quand vous tentez d’apprendre quelque chose, est-ce que vous étudiez quelques fois pendant de longues heures ou au contraire, prévoyez-vous de plus courtes périodes d’apprentissage plus fréquentes? Si vous avez l’impression qu’il est plus efficace d’étudier longtemps et moins souvent, vous n’êtes pas seuls… mais vous avez tort.

Les études démontrent clairement que l’on retient beaucoup plus avec des périodes d’apprentissage espacées dans le temps qu’avec des périodes d’apprentissage groupées dans la même journée. Si l’apprentissage groupé semble plus efficace, c’est qu’après quelques heures ou minutes, les connaissances sont fraiches à la mémoire, donc plus faciles à se rappeler. Toutefois, les exercices faits dans ces conditions ne consolident plus les connaissances dans votre mémoire. Par contre, si vous reprenez votre étude le lendemain ou quelques jours plus tard, vous devez réactiver les connaissances dans le cerveau, ce qui est plus difficile et vous avez le sentiment de moins bien apprendre. Détrompez-vous! C’est dans ces moments que vous consolidez les connaissances et que vous les apprenez à plus long terme. Dans les mots mêmes d’une de mes participantes : apprendre, ça fait mal au cerveau!

Astuce 8 : Recherchez de la RÉTROACTION honnête – même si ça fait mal!

Qui aime réellement recevoir de la rétroaction… soyez honnête! Se faire pointer nos erreurs et nos pistes d’amélioration, c’est dur pour l’égo et pour le sentiment d’efficacité personnelle. Cependant, c’est un mécanisme essentiel et vraiment efficace pour l’apprentissage.

Il existe deux types de rétroaction : la rétroaction positive, qui nous confirme que nous avons bien fait une action ou donné une bonne réponse et la rétroaction négative, qui confirme que nous avons fait une erreur. Les deux types de rétroaction sont importants pour l’apprentissage et ont des effets différents et complémentaires dans le cerveau. La rétroaction positive libère de la dopamine et nous procure une sensation de bien-être, qui augmente notre motivation à apprendre et à poursuivre. La rétroaction négative déclenche les mécanismes de correction d’erreur qui, entre autres, permet de centrer notre attention sur notre erreur et de modifier nos connaissances ou habiletés.

Il ne sert à rien de demander de la rétroaction, si on n’a pas l’intention de changer nos actions. Avec la rétroaction, vient donc automatiquement une réflexion personnelle sur nos pratiques, paradigmes et façons de faire. Les autres peuvent nous donner de la rétroaction, mais ne peuvent pas nous changer! Une réelle motivation à apprendre et à s’améliorer est donc nécessaire pour recevoir de la rétroaction. Les gens qui sont persévérants et qui ont plus de succès sont ceux qui, à force de chercher à s’améliorer, viennent à déclencher les réactions chimiques liées à la rétroaction positive en corrigeant leurs erreurs.

Alors, comment changerez-vous votre façon d’apprendre?

Le monde du travail d’aujourd’hui est incertain, volatile et en perpétuel changement. Le rythme de ces changements ne fait que s’accentuer, il faut que nous soyons tous en mesure de nous adapter en continu à de nouveaux processus de travail et de nouvelles technologies. Apprendre à apprendre est devenue une compétence essentielle pour piloter une carrière florissante accompagnée d’un sentiment d’accomplissement et de plaisir au travail.

Les quelques trucs exposés dans cet article ne sont certainement pas les seuls que vous pouvez mettre en œuvre pour favoriser la rétention et la mise en application de vos apprentissages. Vous pouvez aussi, par exemple, prendre soin de votre santé, marcher tous les jours, boire de l’eau, vous éloigner des écrans pendant un temps, méditer, cultiver votre curiosité, être dans une disposition d’esprit favorisant l’acceptation de nouvelles façons de faire, etc.

À la lecture de cet article, dites-moi : Quelles astuces connaissiez-vous déjà? Savez-vous tirer le maximum de votre temps en formation? Quelles astuces voulez-vous commencer à utiliser? Avez-vous d’autres astuces à partager? Faites-nous part de vos réflexions dans les commentaires.


Références

Bradley, M. M., Costa, V. D., Ferrari, V., Codispoti, M., Fitzsimmons, J. R., & Lang, P. J. (2015). Imaging distributed and massed repetitions of natural scenes: spontaneous retrieval and maintenance. Human Brain Mapping, 36(4), 1381-1392. doi:10.1002/hbm.22708

Dunlosky, J., Rawson, K. A., Marsh, E. J., Nathan, M. J., & Willingham, D. T. (2013). Improving students’ learning with effective learning techniques: promising directions from cognitive and educational psychology. Psychological Science in the Public Interest, 14(1), 4-58. doi:10.1177/1529100612453266

Masson, S. 17 septembre 2019. « Principe 2 : Activation répétée ». Cours Neuroéducation et didactique générale. Montréal : Université de Montréal. Montréal : UQAM.

Masson, S. 12 novembre 2019. « Principe 7 : État d’esprit ». Cours Neuroéducation et didactique générale. Montréal : Université de Montréal. Montréal : UQAM.

Monchi, O., Petrides, M., Petre, V., Worsley, K., & Dagher, A. (2001). Wisconsin Card Sorting Revisited: Distinct Neural Circuits Participating in Different Stages of the Task Identified by Event-Related Functional Magnetic Resonance Imaging. The Journal of Neuroscience, 21(19), 7733-7741.

Moser, J. S., Schroder, H. S., Heeter, C., Moran, T. P., & Lee, Y. H. (2011). Mind your errors: Evidence for a neural mechanism linking growth mind-set to adaptive posterror adjustments. Psychological Science, 22(12), 1484-1489.

Roussel, J. (2011). Gérer la formation, viser le transfert. Montréal: Guérin, éditeur ltée.

Ward, A. F., Duke, K., Gneezy, A., & Bos, M. W. (2017). Brain drain: the mere presence of one’s own smartphone reduces available cognitive capacity. Journal of the Association for Consumer Research, 2(2), 140-154. doi:10.1086/691462

Wilkinson, L., Tai, Y. F., Lin, C. S., Lagnado, D. A., Brooks, D. J., Piccini, P., & Jahanshahi, M. (2014). Probabilistic classification learning with corrective feedback is associated with in vivo striatal dopamine release in the ventral striatum, while learning without feedback is not. Human Brain Mapping, 35(10), 5106-5115. doi:10.1002/hbm.22536


L’utilisation des approches actives pour favoriser l’apprentissage

Neurons Blue

L’utilisation des approches actives pour favoriser l’apprentissage

Sophie Lanoix

Par Sophie Lanoix

La présentation magistrale a eu la vie dure ces dernières années. Les spécialistes en formation le savent, les méthodes d’apprentissages « actives » sont beaucoup plus efficaces que les méthodes « passives ». La présentation magistrale, vue comme activité d’apprentissage passive est donc presque devenue un paria dans la liste des méthodes de formation en entreprise et oser la proposer revient parfois à un blasphème.

Mais pourquoi favorise-t-on autant les méthodes actives? Et a-t-on réellement raison? Et pour commencer, quelle est la différence entre les méthodes actives et passives?

Une activité d’apprentissage est-elle active ou passive?

J’entends souvent des experts de contenu me dire qu’une formation en ligne est « interactive » parce qu’elle contient plusieurs vidéos et des images sur lesquelles les apprenants doivent cliquer pour lire des informations supplémentaires. Vous vous en doutez, ce n’est pas la bonne définition d’ « interactivité » en formation.

En apprentissage, lorsqu’on dit qu’une méthode est « active » c’est que l’apprenant est concentré sur l’objet de l’apprentissage et qu’il doit produire quelque chose avec le contenu. Illustrons ce concept par un exemple.

Prenons le cas où un apprenant doit cliquer sur un élément dans un cours en ligne. Cette action peut être « active » ou « passive » selon le contexte dans lequel l’apprenant doit faire le geste de cliquer sur l’élément.


Diapo avec une question

Activité d’apprentissage « active »

L’apprenant clique sur une image parmi quatre comme réponse à une question.

Il s’agit d’une action « active », car l’apprenant doit réfléchir à la question, analyser les quatre éléments et choisir consciemment un de ces éléments comme réponse. Son cerveau est alors engagé dans l’apprentissage, car il doit faire appel à des connaissances emmagasinées dans sa mémoire pour répondre à la question. Dans ce cas, il doit produire un choix de réponse.


Diapo avec lecture animée

Activité d’apprentissage « passive »

L’apprenant clique sur l’image pour faire apparaître la prochaine boîte de texte à lire.

Ici, l’apprenant n’a pas de choix à faire à propos du contenu. Cliquer sur l’image pour faire apparaître la prochaine boîte de texte est équivalent au geste de cliquer sur « suivant » pour faire apparaître la prochaine page du cours. L’apprenant n’a rien à produire avec le contenu.

La même logique s’applique aux formations en classe. Lorsque l’apprenant est assis et écoute une présentation magistrale ou regarde une vidéo, on considère qu’il est passif dans son apprentissage. Lorsqu’il répond à des questions, tente de résoudre un problème ou analyser une mise en situation, on considère qu’il est actif dans son apprentissage. L’apprenant doit alors activer son cerveau et utiliser ses connaissances pour faire des liens entre les concepts.

Pourquoi le cerveau doit-il être actif pour apprendre?

D’abord, pourquoi offrez-vous de la formation dans vos organisations? Généralement, parce que vous voulez que les gens changent de comportement ou adoptent de nouveaux comportements. Par exemple, si vous donnez de la formation sur le leadership, c’est pour que les gestionnaires changent leur façon de gérer et soient plus efficaces et efficients. Si vous donnez une formation sur l’utilisation d’un chariot élévateur, c’est que vous voulez que les employés adoptent des comportements sécuritaires lorsqu’ils utilisent le chariot élévateur.

Pour répondre à la question « Pourquoi le cerveau doit-il être actif pour apprendre? », on doit regarder ce qui se passe dans le cerveau pendant qu’une personne apprend. Le comportement d’une personne dépend de ses connexions neuronales. Pour changer de comportement, on doit donc créer de nouvelles connexions entre nos neurones ou carrément créer de nouveaux neurones. C’est la définition même de l’apprentissage en neuroscience.

Quand une personne apprend une nouvelle habileté ou un nouveau comportement, des neurones s’activent et se connectent ensemble. Si ces neurones s’activent et se connectent ensemble assez souvent, il se crée un chemin entre les neurones, un peu comme un sentier en forêt. Lorsque le chemin est bien tracé, l’habileté ou le comportement est bien ancré et la personne est en mesure de le reproduire. Plus le sentier est fréquenté, plus il est tracé profondément, plus facile il est de l’emprunter. Donc, plus on exécute un geste souvent, mieux et plus facilement on s’en souvient.

Règle de Hebb: Les neurones qui s’activent ensemble se connectent ensemble.

Quelques exemples d’activités d’apprentissage actives

Dans un cours en ligne asynchrone

  • Associer une image à un mot ou à un concept
  • Répondre à une question à choix multiple, que les options soient présentées avec des mots ou des images
  • Ordonnancer des étapes d’un processus
  • Glisser-déposer un mot ou une image dans la bonne zone
  • Identifier les erreurs ou les bons éléments dans une image
  • Etc.
  • Dans une classe en présentiel ou virtuelle

    • Expliquer un concept à son collègue
    • Répondre à des questions
    • Écrire une étude de cas
    • Expliquer les conséquences d’une action
    • Analyser les options possibles pour la résolution d’une mise en situation
    • Faire les gestes de l’habileté psychomotrice à acquérir (conduire le chariot élévateur, utiliser un appareil d’imagerie médicale, manipuler un instrument, etc.)
    • Pratiquer une compétence de communication dans un jeu de rôle
    • Etc.

    Les méthodes passives sont-elles donc à jeter à la poubelle?

    Cela étant dit, on apprend aussi quand on lit un texte ou lorsqu’on écoute une présentation magistrale, même si l’on considère que ce sont des activités d’apprentissage passives. Des études ont démontré que lorsqu’on observe une action, les mêmes neurones s’activent dans le cerveau que lorsqu’on fait l’action. Donc, si l’apprenant est attentif et capable de suivre mentalement les actions que le présentateur fait pendant la présentation magistrale, l’apprentissage commence dans son cerveau. Le comportement ou la connaissance ne sera toutefois pas bien ancré et il faudra des méthodes d’apprentissage actives pour les consolider.

    Les méthodes passives telles que la présentation magistrale, l’écoute de vidéo ou la lecture sont donc quand même utiles. On les privilégiera lorsque la tâche est complètement nouvelle pour l’apprenant, ou lorsque le risque d’erreur est très grand. Elles serviront à poser les connaissances de base dont les apprenants pourront se servir par la suite pour pratiquer la compétence avec des méthodes d’apprentissage plus actives. De plus, les présentations magistrales permettent à un formateur de nuancer plus efficacement ses propos qu’un texte, de modeler des comportements et des valeurs et de stimuler la motivation des apprenants.

    Conclusion

    Je l’avoue : je suis une de ces personnes qui font la vie dure à la présentation magistrale et aux méthodes d’apprentissages passives. Toutefois, je reconnais aussi leur valeur dans certaines circonstances. Je demeure quand même une grande adepte des méthodes actives, surtout considérant que les apprenants qui entrent dans nos formations en milieu de travail ont généralement des connaissances antérieures liées au sujet de la formation. Il est beaucoup plus facile d’acquérir de nouvelles connaissances et habiletés lorsqu’on est capable de les relier à des choses que l’on connaît déjà.

    Nous avons créé une

    Grille de variété de méthodes d’apprentissage

    simple et facile à utiliser pour aider les concepteurs à déterminer dans quelle mesure leurs cours en ligne, en classe ou virtuels sont passifs ou actifs.


    Téléchargez la grille

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    Références

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